1. pièce du 23 mars 06 : quelques sensations
Le son d'abord. J'ai envie de commencer par là, parce que la première vision ne livre pas les secrets visuels de l'histoire. A la première vision, vous pouvez très bien ne vous apercevoir de rien (ou si peu, juste avoir un doute dans l'oeil), tellement le parcours de la voiture, à vitesse constante, ramassé dans le temps, discret jusque dans la chromie volontairement réduite de la photographie, laisse échapper ce qu'il y a dedans, ou derrière, creusé dans la durée. Le son, lui, parle et touche au premier passage : c'est l'oreille qui guide l'oeil. La vocalise instrumentalisée qui monte, s'amplifie et fait varier son phrasé au fil du parcours, où se mêle un filet de voix quasi humaine, juste à la fin de la phrase. Le chuchotement audible mais incompréhensible, en "voix off", qui fait sentir qu'il y a quelque chose au delà. Les percussions liquides en écho, qui mettent la phrase en suspens, arrêtent l'attention, jettent un suspense entre les piliers du porche : elles ne reviendront pas, alors que le chuchotis, lui, se poursuit, enfle, occupe le volume sonore. Il baisse d'un ton enfin, laisse le devant de la scène à ce bruit étrange d'envol, d'abord un souffle ou un bruit d'aile qui relaie la vision des oiseaux ; devient le son de quelque vague faisant rouler les galets d'une rumeur invisible (expansion du chuchotis), et, à la troisième apparition sur la scène sonore, la mécanique d'un très grand vent (où j'entends aussi les cris lointains d'un gigantesque vol d'oiseaux), qui dans son arrêt brutal de tempête retombée, laisse place à un dernier son : le silence qui glisse sur un mystère. Du début à la fin, il y a quelque chose qui ressemble bien à de discrets trompe l'oreille dans le design sonore, qui se répète et ne cesse de se transformer en douce.
C'est très beau...
A votre avis, combien de références à Monsieur M.C.Escher dans ce film ? http://www.nga.gov/cgi-bin/pimage?61019+0+0+ggescher
Rédigé par : Alex | 23.03.2006 à 22:55
j'y viens... il y en a 5. La réalisation en prévoyait une sixième, mais la séquence de cette sixième semble avoir été coupée. En fait, ce spot a été décrypté abondamment et précisément depuis sa sortie, en 2003. En revanche, il me semble que peu de monde s'est intéressé aux effets narratifs que cette "eschérisation" produisait, au delà de l'effet spécial.
Rédigé par : flo | 23.03.2006 à 23:04
Et vous qu'en pensez-vous ?
Rédigé par : Alex | 23.03.2006 à 23:19
Je pense qu'elle fait du spot, non pas quelque chose de linéaire, comme une démonstration produit ou marque, par exemple, mais un thème poétique, qui se lit en profondeur et qui réinvente ses signes. Ainsi, il y a d'un côté le temps du spot, de l'autre sa durée, qui est celle de la perception. Ce sont les "eschérisations", détourneuses de réalité, qui changent ainsi le temps de lecture. De la même façon, il n'y a pas de "message publicitaire" classique dans ce spot, celui-ci reste suspendu. Le produit, la marque, malgré leur évidente présence, passent au fil des visions au second plan, le film les absorbe, comme si la voiture n'était plus le sujet réel du film. L'aspect publicitaire se fait escamoter. Et pourtant demeure. Paradoxe... eschérien ?
Rédigé par : flo | 23.03.2006 à 23:31